November 24, 2020

Des hommes, des vrais !

Des hommes, des vrais !

Il y a du nouveau dans les représentations de la masculinité dans la pub ! Le sujet n’est pas tout récent mais il y avait longtemps qu’on espérait le voir au coeur du discours de grandes marques. 

La campagne “Men in progress” de Jules fait sortir la marque de sa zone de confort pour envoyer valser les clichés et redéfinir ce qu’est un homme, à savoir un homme “prêt à porter le progrès”. 

Concrètement, être un homme n’a plus grand chose à voir avec le fait d’avoir de gros muscles ni d’être capable d’allumer un feu – beaucoup le savaient déjà mais aucun mal à le rappeler. Ce qui fait un “homme en mouvement”, c’est son refus des modèles de consommation obsolètes – la modernité passant chez Jules par le choix de vêtements en coton bio ou recyclés – mais aussi et surtout sa capacité à s’affranchir des attentes liées à une vision démodée de la masculinité.  

Gillette, de son côté, redéfinit sa “Perfection au Masculin” avec une campagne print qui souligne la diversité des visages de la masculinité d’aujourd’hui. La marque a aussi présenté une campagne vidéo, “L’homme que vous êtes”, réalisée par les élèves de l’école Kourtrajmé et l’agence Marcel. Chaque vidéo transcrit le discours intérieur d’un homme qui se rase, seul face à son miroir et face à une situation à affronter “comme un homme”. D’une part les apparences, l’image avec la campagne print et d’autre part l’action, la possibilité d’agir en accord avec celui que l’on est au fond de soi avec la campagne vidéo. 


Ce qui est intéressant ici, c’est d’abord de constater que des marques mass market s’emparent de cette thématique et prennent le relais de marques plus avant-gardistes et de médias plus avancés sur la question, comme Vogue US qui choisit pour la couverture de son édition de décembre et pour la première fois depuis sa création un homme, Harry Styles, vêtu d’une robe, déclenchant au passage une polémique.  

Pas de robes chez Jules ni chez Gillette mais, en proposant une multitude d’expressions de la masculinité, c’est bien un message de liberté qui est véhiculé. Ressemblez à qui vous voulez, faites ce que vous voulez, il y a mille manières d’être un homme. 

Ces deux campagnes ouvrent la porte à la possibilité de réécrire les règles de la masculinité tout en façonnant sa propre identité, à la fois sur le plan des apparences et sur le plan des comportements. Deux exemples relevés récemment qui s’inscrivent dans cette nouvelle logique d’une masculinité new look :

– Le premier est une innovation Shiseido qui a présenté cet été sa première cartographie du visage spécifiquement conçue pour les hommes. Le but : les aider à utiliser au mieux le maquillage pour obtenir différents effets et avoir, selon les circonstances, l’air cool, gentil ou dynamique – une logique de réinvention quotidienne de soi. 

– Le second est un phénomène décrit ici par l’ADN : la tendance “homisexual” qui, sur TikTok, désigne les vidéos de baisers ou danses équivoques entre copains hétéros. Une tendance d’ailleurs préfigurée par le clip du morceau “Virile” dévoilé par The Blaze en janvier 2016, sous lequel on peut lire des commentaires comme “If this is friendship, it’s the best form of it. If this is love it’s the best love” ou “Destroys toxic masculinity in just one video”. 

Pour tous et pour chacun 

Stéréotypes dégommés, identités complexes, spectre de genre : la notion de liberté rejoint celle d’universalité dans la place croissante occupée par des produits et des lieux non-genrés. On a parlé de boutiques comme le concept store Adidas ouvert à Londres récemment. Ce 25 novembre, Pharrell Williams lance Humanrace, une gamme skincare clean et éthique et destinée à tous, sans distinction de genre ou d’origine ethnique. Dans les deux cas, on évacue la question du “pour qui” pour se concentrer sur le “pour quoi”, c’est-à-dire sur ce qui compte.

Un exemple moins connu mais tout aussi intéressant : celui de l’agence de mannequins anglaise Brother qui depuis 2016 propose des visages et des corps pas tout à fait conformes aux normes de beauté conventionnelle et qui vient de créer 2.0, une nouvelle catégorie de modèles. 

2.0 se veut une catégorie inclusive et tournée vers l’avenir dans laquelle se reconnaissent des individualités plutôt que des mannequins hommes ou femmes – parmi ces individualités, un certain nombre se reconnaissant dans le pronom neutre “They/them”. 

Certes l’agence a conservé les catégories plus classiques “Boys”, “Girls” et “Curves” bien utiles aux agences en quête de profils particuliers mais le futur incarné par ce 2.0 est bien un monde dans lequel il est possible que – comme les numéros que vous donne la Sécu – les gens “ne rentrent même pas dans les cases”.