June 6, 2025

Le végétal en mode fast & furious

Le végétal en mode fast & furious
Bonduelle

Key takeaways in English at the end

La nouvelle campagne d’affichage Bonduelle m’a interpellée parce que j’ai d’abord cru, de loin, à une campagne Burger King – avant de m’approcher et de découvrir, à la place d’un burger dégoulinant, la boite de pois chiches à l’origine de tant d’enthousiasme et de plaisir gustatif.

Campagne Bonduelle

Après s’être attachée à « faciliter l’envie » de légumes (2020), la marque revient à son emblématique « Quand c’est bon, c’est Bonduelle », ici rythmé, modernisé par des accroches comme « on le dévore » ou « on le partage ». Un retour au plaisir revendiqué, au cœur d’un projet plus large : transformer le regard porté sur les légumes et réconcilier végétal et gourmandise. Cette promesse se décline à travers plusieurs activations fortes :

  • un concept store, le Bon Bon Bon, inauguré à quelques pas du siège à Villeneuve d’Ascq, à la fois boutique et lieu hybride mêlant restauration rapide et exploration culinaire autour du végétal
  • la création fin avril à Paris du Bon Festival, conçu comme une ode au végétal à travers une exposition démontant les clichés et des ateliers animés par le Top Chef Merouan Bounekraf
  • une centaine d’animations en GMS
  • une "collab veggie gourmande" avec Burger King (le voilà, le burger), avec un Master du Chef Falafel signé Paul Pairet

Ce repositionnement cherche à dépoussiérer l’image du légume, en rajeunissant ses codes. Identité visuelle refondue, packaging repensé, visuels qui empruntent sans complexe à l’univers de la street food : Bonduelle se nourrit des codes du fast-food pour injecter de l’énergie à son offre végétale.

Des codes du végétal en pleine mutation

La campagne envoie valser les clichés : gros plans sur des sandwichs et snacks ultra-généreux, saisis à pleine main (effet « hand grab »), bouches entrouvertes, lèvres brillantes, textures appétissantes, sauces onctueuses, couleurs saturées. Les corps s’effacent pour mieux faire place au plaisir brut de la dégustation. Le résultat ? Des visuels 100% influencés par une esthétique fast food pour des produits qui n’ont rien à envier aux burgers, hot dogs et autres tacos en termes de gourmandise, tout en étant 100 % végétal et plus sains.

Cette adoption des codes de la street (voire, dans certains cas de la junk) food n’est pas isolée. Elle s’inscrit dans une tendance que l’on retrouve déjà chez des marques comme Better Balance, Swap, Kokiriki, Violife ou encore La Vie (champion avec ses Dirty Vegan Burgers)

Kokiriki, Swap foods, Violife, Mazette!, better balance, La Vie, NotCo

Ce que ces marques proposent, c’est une vision décadente du plaisir végétal : sauces dégoulinantes, fromages fondants, recettes qui rassemblent, qui réconfortent, qui se partagent. On est bien loin du végétal austère, sain mais triste, réservé aux assiettes solitaires. Exit aussi la fraîcheur ascétique, la pureté mesurée, l’équilibre imposé.

Plaisir ET santé : plus besoin de choisir

Comme le souligne cet article, le compromis entre plaisir et bénéfices santé n’est plus à l’ordre du jour. Les codes évoluent pour refléter une nouvelle équation où l’on peut tout avoir. Le végétal se fait chaleureux, généreux (des snacks gourmands et « complets »), sensoriel. On valorise le fait-main, les saveurs maison, l’humain. On revendique la transgression, voire l’expérience « cosmique ».

Un exemple frappant de cette nouvelle ère : Goodles, marque américaine qui réinvente le mac & cheese. Les recettes sont enrichies en fibres et protéines, mais c’est surtout leur branding qui change la donne : jeux de mots accrocheurs (Ched Over Heels, Twist My Parm, Here Comes Truffle), design dopaminé aux couleurs saturées, typographies 70’s et fromages dégoulinants photographiés en très gros plan. Leur promesse ? « They lied. You can have it all. »

Goodles

Street food et fast food : nouvelles grammaires générationnelles

Enfin, au-delà d'une esthétique, ce sont aussi des usages, des manières de consommer qui s’imposent à travers la culture street food : nomadisme, rapidité, plaisir immédiat, partage.

Deux campagnes récentes l’illustrent en miroir : celle de Grand Frais, qui célèbre la rapidité inspirée du fast-food, et celle de Knorr, qui la détourne en repoussoir, incitant à revenir au fait-maison à travers une campagne participative sur les fails de livraison.

Campagnes Grand Frais et Knorr

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En résumé

Avec cette campagne, Bonduelle ne se contente pas de moderniser son image : elle change les règles du jeu. En adoptant les codes visuels et émotionnels de la street food, elle brouille les frontières entre santé et plaisir, entre fast-food et végétal.

Loin d’une posture opportuniste, ce virage s’inscrit dans une dynamique plus large portée par toute une génération de marques qui refusent de choisir entre gourmandise et conscience. Le végétal n’est plus une alternative : c’est un terrain d’expression à part entière, désirable, assumé, et résolument contemporain.

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Key takeaways

  • Bonduelle reinvents its image with a bold campaign combining its iconic slogan with street food aesthetics – rich visuals, hand-grab shots, dripping sauces, and bold colors.
  • Broader repositioning includes a concept store (Bon Bon Bon), a food festival (Bon Festival), and in-store activations across France.
  • Visual codes evolve: Vegetables are no longer portrayed as “healthy but boring” – they're framed as indulgent, satisfying, and socially vibrant.
  • No more compromise between health and indulgence – sensory richness and playful branding take center stage. Brands like Goodles embody this new “you can have it all” mindset – nutrient-rich comfort food with high-impact design.
  • Cultural shift: Street food and fast food become the new grammar of food culture, shaping expectations around speed, sharing, and sensory pleasure.